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Contenu libre et rémunération

18 septembre 2010 aucun commentaire
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Deux articles parus il y a peu, traitants grosso modo des questions de droits d’auteurs et de rémunération du travail fourni, me poussent à écrire ce billet sur lequel je réfléchissait depuis un moment.

Comment faire comprendre qu’il y a des bénéfices (financiers mais surtout humains) qui se cachent derrière le fait de travailler gratuitement ?

L’auteur des propos sur l’article d’OWNI se plaint de ne pas être rémunéré à la hauteur de ses attentes lorsqu’il développe son logiciel. Si on part d’un point de vue purement factuel, c’est finalement assez logique qu’un logiciel libre ne rapporte pas d’argent de façon direct à ses créateurs. Etant libre, il n’entraîne aucune obligation pour l’utilisateur. Celui-ci se sentant même parfois dans son droit en réclamant de façon plus ou moins agréable support et mises à jour à l’auteur. Qui ne tente rien n’a rien, hein ? Dans ma jeunesse, il y avait un grand distingo entre les freewares et les sharewares. Cette différence tend à disparaître avec le temps.

Quant à l’article publié chez Numerama, il conclue, en substance, que la création musicale et les revenus des créateurs ne sont pas mis en danger par le partage gratuit sur internet, en tout cas en Norvège sur les 10 dernières années, preuve qu’il doit être possible de survivre (financièrement parlant) sans pour autant faire la chasse à ceux qui ne donnent pas d’argent (ou, plus probablement, pas assez d’argent comparé à leur consommation).

Quid de la morale dans tout ceci ? C’est un comportement bien étranger à la culture française. Chez nous, on est radin sur le pourboire, alors que dans d’autre pays la règle sociale impose de rémunérer même un tout petit peu le serveur qui vous a amené votre collation. C’est la même chose dans la consommation. Il est difficile de faire comprendre à nos concitoyens que lorsqu’on a apprécié un contenu gratuit (musique, vidéo, texte, logiciel, …) il est de bon ton de se renseigner sur la façon dont on peut aider l’auteur du contenu en question (non, y’a pas de message caché !), aide qui par ailleurs n’est pas nécessairement sonnante et trébuchante.

C’est la même chose qui fait que les systèmes de micro-paiement permettant de donner une petite obole aux gens produisant des contenus libres pour les encourager ont beaucoup de mal à démarrer en France. Nous avons pris pour habitude de payer pour avoir quelque chose, pas d’avoir des choses gratuites entraînant le devoir moral de rémunérer l’auteur en fonction de l’appréciation et à la hauteur de ses moyens. Ce serait pourtant l’idéal en matière de rémunération.

Mais alors, comment gagner de l’argent avec ce qu’on fait sans devoir le réclamer ? Autrement dit, quels sont les habiles mécanismes permettant de pousser des gens à vous donner de l’argent sans coller une étiquette avec un prix sur chaque chose ?

C’est loin d’être facile, mais voici quelques pistes. Attention, je vous révèle ici une partie de mon plan diabolique pour devenir le maître du monde :

  • Fournir quelque chose d’utile pour la collectivité en indiquant qu’on peut fournir encore mieux moyennant finances. C’est grosso modo ce qu’a fait Olivier comme il le raconte dans l’article d’OWNI. Captiver sa clientèle avec quelque chose de très apprécié et monnayer, par la suite, l’amélioration de la chose.
  • Pas si éloigné, fournir en avant première quelque chose qui sera accessible gratuitement par la suite. Vendre sa musique à ses fans payant un abonnement mensuel sur son site sans poursuivre ceux qui vont la copier par la suite, ou bien offrir simplement sa musique mais facturer les prestations live au tarif fort. C’est ce que font beaucoup de petits artistes de nos jours, parvenant, grâce aux copies de leurs oeuvres circulant gratuitement, à faire salle comble lors des concerts alors qu »il y a encore 10 ans, il n’y aurait eu personne.
  • Fournir quelque chose gratuitement en espérant se faire connaitre auprès de gens recherchant expressément ce genre de talents pour leurs besoins propres. Si demain un journal me demandait un article de vulgarisation sur un point précis je le facturerais, tout en continuant à perdre mon temps à produire gratuitement du contenu ici.
  • Assez proche aussi, verser dans le domaine publique la réalisation qu’on a déjà facturé une ou plusieurs fois. Par exemple, un photographe vends 10 fois sa photo scoop à des journaux et la libère 2 mois plus tard.
  • Enfin, pour le cas spécifique du logiciel libre, toute une industrie s’est développée autour, partant du principe que, puisque le temps de création du logiciel est un poste de coût fixe, il est injuste de le vendre à prix fixe à un nombre non déterminé d’utilisateurs. De la vient l’idée toute naturelle de ne pas faire payer le logiciel mais de privilégier la facturation du temps passé au cas par cas. Énormément de développeurs de logiciels libres mettent leur talents au service des utilisateurs les plus demandeurs et facturent leurs honoraires. Le logiciel libre qui se cache derrière n’étant qu’un prétexte pour créer son petit marché. A ce sujet, Romy a d’ailleurs fort bien expliqué que le logiciel libre n’est financièrement pas toujours le bon choix.

Quel est l’intérêt de tout ça ? Quel que soit la technique que vous mettez en oeuvre pour tirer des revenus de créations diffusées librement, vous participez à un élan de partage de la connaissance, de la culture ou des outils qui permet de récolter les fruits de son travail plus rapidement, puisque toute une communauté oeuvre dans le même sens.

Ça permet aussi de démarrer des relations basées sur le partage avec des personnes ayant les mêmes buts sans avoir a parler argent immédiatement, sujet très vite tabou qui a, à travers l’histoire, tué dans l’oeuf tout un tas de choses qui auraient pu être culturellement et financièrement très appréciées.

Un exemple assez souvent oublié est notre ami Google. Ils ont, de tous temps (je me souviens encore de leur timide apparition face au géant Altavista), fourni gratuitement tout un tas de services, on peut critiquer à juste titre leurs méthodes, mais ça ne les empêche pas de très bien gagner leur vie sans jamais avoir piqué un centime aux gens qui bénéficient de leurs services (ils ont été plus efficaces que moi, en matière de devenir maître du monde, je suis affreusement jaloux)

En bref, comme disait Jonny Lee Miller dans Hackers en 1995 (ça nous rajeuni pas) « PIRATEZ LA PLANÈTE » … A commencer par vos propres créations !

[Ceux qui n’ont pas vu ce film ou qui l’ont oublié, c’est urgent de le visionner, ça colle bien à l’actualité]

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