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Economie coopérative : rebooter les modèles du 20ème siècle

14 décembre 2015 aucun commentaire
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[La présente prose est l’œuvre de l’ami Drapher, en CC-BY-SA. Et pour l’occasion, pas d’illustration, parce qu’il ne faut pas vous détourner le regard du fond !]


Le 21ème siècle appelle de nombreux changements, dont un qui est central : la gouvernance. Les systèmes politiques sont à bout de souffle, et c’est du côté des structures économiques, citoyennes, sociales, que les changements majeurs sont en train de survenir. Internet est au centre de cette mutation, changement qui veut que les hommes et les femmes de ce nouveau siècle peuvent collaborer les uns avec les autres sur de nouvelles bases, en inventant de nouveaux modèles.

Le vieux modèle étouffe

Depuis le 19ème siècle, c’est le modèle pyramidal qui prime dans l’entreprise, les institutions, l’Etat, — et en réalité — dans toutes les structures. Le principe pyramidal est d’organiser le travail depuis le haut vers le bas. En haut, les dirigeants, qui orientent et ordonnent, puis des cadres (ou structures) intermédiaires qui répartissent les tâches, jusqu’aux exécutants qui… exécutent. Structure verticale, centralisée, donc, basée sur le pouvoir du capital, la hiérarchie, l’autorité et la suprématie d’une classe sur les autres, celles des détenteurs de la richesse sur les masses. Une forme de continuation du système monarchique.

Internet a bousculé ce modèle La raison est simple : Internet est décentralisé, sans hiérarchie, sans classes, et offre le « pouvoir » à ceux qui… agissent en son sein. Il existe donc désormais des modes de fonctionnement humains basés sur le fonctionnement d’Internet. Ils sont axés sur quelques critères assez simple mais essentiels : la transparence, la coopération, l’horizontalité et le partage de connaissances, de compétences etc… L’opposé exact du vieux système du 20ème siècle basé sur : l’opacité, l’autorité, la compétition, la captation (de savoirs, de richesses).

Un changement s’opère-t-il ?

Les sociétés modernes offrent de plus en plus de facilités (déplacements, communications, acquisitions de savoirs, etc) qui permettent à leurs habitants d’envisager leurs existences autrement que par la simple vocation d’obtenir un emploi, de s’y maintenir le plus possible en attendant l’âge de récupérer l’argent cotisé au cours de sa vie, pour «enfin » vivre sans travailler en bénéficiant d’une pension par répartition, ce qui est appelé la « retraite ».

Il est désormais acquis que l’emploi n’est pas garanti pour la plupart des citoyens, que les individus ont de toute manière de plus en plus envie de se former tout au long de leur vie et de changer d’activité, et que l’épanouissement personnel est de loin le critère le plus important pour définir la notion de « travail ».

Le travail est une activité permettant avant tout de faire du lien social. L’être humain est un animal social et si vous l’isolez il dépérit. Travailler, au XXème siècle était uniquement déclaré comme « une nécessité pour se nourrir, se vêtir, se loger », et cette vision du travail a largement participé à créer une société angoissée et dépressive, mécontente de son sort et asservie au pouvoir politique ou économique.

Au XXIème siècle, ce phénomène est en train de se modifier. Les nouvelles structures économiques qui émergent ne basent plus leur fonctionnement sur les modèles de compétitivité, compétition, rentabilité maximale, et ne fonctionnent plus sur la base pyramidale ancienne. Le but des ces structures et des individus qui poussent dans ce sens ? Créer les conditions les plus favorables pour permettre à des ceux qui s’y meuvent d’échanger les uns avec les autres dans un objectif commun. Ces conditions se créent au sein de structures économiques, puisque le moyen le plus simple de faire des choses les uns avec les autres, est d’avoir une activité commune, et comme l’argent reste — le plus souvent — un outil indispensable pour « faire des choses », cette activité est fréquemment économique.

Une vision autre de l’économie est-elle possible ?

Les nouvelles structures coopératives, basées sur la collaboration horizontale des individus ont pour objectif de permettre à ceux-ci de s’épanouir dans leurs activités. Qu’ils gagnent d’ailleurs de l’argent ou non au sein de la structure. Le but est de fournir des conditions de travail épanouissantes, un mode relationnel équilibré, une fluidité dans les actions individuelles ou collectives. Pour résumer, ces structures cherchent à faire que chaque membre de la structure « s’éclate » en son sein. Pour le bien de tous, comme pour le sien.

Les méfaits de « l’argent » dans le modèle du XXème siècle sont connus : jalousies, besoin de dominer, obsession de la performance, etc…

Mais pourtant ces méfaits n’existent pas dans les structures d’avenir qui se constituent au XXIème siècle, et que nous appellerons « coopératives d’épanouissement ». La première raison est que l’économie est une chose différente de l’argent. On peut créer une économie sans argent, par exemple. Les principes de « gagner sa vie » ou de « faire des profits » n’ont pas cours dans une coopérative d’épanouissement du 21ème siècle, pour la simple et bonne raison que ces critères ne sont pas significatifs.

On ne travaille pas dans ce type de structures : on y a une activité. Rémunérée, ou non, de large amplitude ou de faible ampleur, mais le principe central reste : l’épanouissement de chacun en son sein. Si payer quelqu’un qui a un besoin financier est nécessaire pour que la structure continue à fonctionner de manière équilibrée, il est possible de le faire. Ce sera l’ensemble des acteurs de la société qui le décideront ensemble. Si l’activité semble importante aux yeux des membres, et si le besoin financier est considéré comme raisonnable. Inversement, des acteurs peuvent ne pas demander de rémunération pour leurs activités. Les raisons peuvent être diverses : activité réduite ou aléatoire, pas de besoin financier particulier, envie de profiter de l’activité sans contrepartie pour ne pas subir le « poids de l’argent », etc…

Cette économie, profondément collaborative et coopérative n’a pas pour objet l’enrichissement personnel de ceux qui s’y activent. Elle est avant tout un moyen pour des individus de créer de l’activité ensemble. Ce qui ne signifie pas qu’elle ne doit pas se préoccuper d’être rentable au sens — avant tout — de ne pas « vivre au dessus de ses moyens », d’être autonome financièrement.

C’est impossible ma brave dame !

Le rapport à l’argent, aux besoins matériels, à l’effort, à l’échange, à l’autorité, à l’autonomie sont au cœur de cette nouvelle approche dans le travail. Si l’argent est un moteur principal (pour ceux qui veulent participer), cela ne fonctionne pas. Tout comme le fait d’avoir une activité pour avant tout satisfaire des besoins matériels . L’effort, subi comme une contrainte désobligeante, ne permet pas non plus de faire fonctionner ce types de structures. L’autorité quant à elle, renvoie toujours au pouvoir, donc à l’argent, même symbolique, et ne permet pas l’épanouissement, c’est une chose établie. L’autonomie est bien entendu indispensable, puisque sinon, chacun attend des ordres ou des validations… d’une autorité.

Ce types de structure peuvent donc se constituer avec des individus autonomes, sans appétence pour le pouvoir, pratiquant la collégialité, ayant remplacé le mot effort par épanouissement dans l’activité, et ayant un rapport sain à l’argent , c’est-à-dire dégagé au maximum qu’il est possible de le faire.

Ces nouveaux modèles renvoient à des changements majeurs dans les sociétés développées, instiguées par les individus, sans le contrôle du pouvoir politique. Ils représentent une forme de maturité sociale et économique, politique, qui peut modifier sensiblement la donne face à un vieux monde autoritaire et prédateur qui s’accroche à ses prérogatives.

Ces structures peuvent changer la donne: particulièrement d’un point de vue social, puisqu’elles démontrent qu’en sortant des schémas établis et déclarés comme incontournables, le travail peut devenir une manière de bien vivre, être avec les autres, un plaisir, créer des richesses, une contingence pratique mais sans enjeu.

Au final, il semble que désormais, tout soit possible. Surtout les choses qui paraissent impossibles.

Puisque après tout, ce ne sont que des hommes et des femmes qui empêchent ou permettent les renouveaux.

Pour changer le monde, il faut toujours commencer par changer soi-même. Les nouvelles structures économiques sont une part très importante de ce changement de monde nécessaire.

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