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Ma candidature de pilote

8 novembre 2010 4 commentaires
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Crédit photo : Marind (flickr)

Non, je ne vais pas faire de candidature funky. J’aime l’exercice de style, mais là, je suis sérieux. Enfin, je vais essayer.

La haute autorité a affiché avec les labs une volonté de dialogue ouvert avec la communauté des internautes. J’entends donc tester cette ouverture et voir si le collège de la haute autorité irait, dans l’ouverture, jusqu’à placer une personne, ouvertement anti-hadopi et n’ayant pas fait de stage dans une grande école, à la tête d’un lab.

Non, je n’ai pas de cas de conscience de percevoir une rémunération de la part de la haute autorité, surtout s’il s’agit de l’ouvrir sur les sujets importants et si une chance m’est donnée d’éviter que tout ça ne devienne un foutoir encore plus innommable que ce que c’est déjà. Ne rêvons pas à un avenir meilleur, c’est encore trop tôt.

Si je me rends compte en cours de route que tout ça n’est effectivement qu’une mascarade comme le craignent certains, il sera toujours temps de claquer la porte ou bien de rester en place pour se taire et faire en sorte que l’argent récolté puisse au moins servir à financer ce qui doit l’être pour mettre fin à la mascarade.

Je vais donc poser ma candidature pour la fonction d’expert pilote du lab HADOPI internet & sociétés sans pour autant freiner mon ardeur à lutter contre les lois en I, les dérives de la haute autorité qui en peuvent en découler, les lois en discussion et l’envie que j’ai de faire connaitre d’autres modes de découverte de la culture.


A l’attention du bureau du Collège,

Je me trouve dans une position délicate. Mon métier, mes diverses passions et mes engagements associatifs entraînent le fait que je côtoie quotidiennement des personnes qui sont farouchement opposées à la HADOPI et qui ne croient pas dans les promesses faites de dialogue et de concertation.

Je partage les avis des détracteurs de la loi HADOPI dans leur ensemble, que ce soient les plus légalistes comme FDN, les plus activistes comme le Parti Pirate Français, en passant par La Quadrature du Net.

Je suis moi-même contre le principe de réponse graduée, dans son principe, car éduquer par la peur ne fait pas partie de ma culture, mais aussi dans sa mise en place, principalement du fait qu’il me semble aberrant que le volet dit pédagogique ait été mis en route avant que les outils (aide à la sécurisation, labellisation de l’offre légale, …) ne soient lancés. Et enfin à cause du flou qui entoure les chiffres que chaque partie en présence tourne et détourne pour leur faire dire tout et n’importe quoi.

Je veux par contre encore croire, ne serait-ce qu’un petit peu, que le second métier de la haute autorité est une chance qu’il faut saisir. Ou, du moins, je voudrais pouvoir mettre le nez dedans pour constater sur pièce si oui ou non il est possible de faire sortir quelque chose de tout ceci. Quelque chose de positif pour tout le monde.

Mon avis est que le volet dit pédagogique des activités de la haute autorité n’a que peu d’avenir à court terme. La partie travail de fond, réflexion et prospective a, par contre un réel intérêt si elle ne reste pas une coquille vide ou ne devient pas un cache-sexe comme certains l’ont dit.

C’est en ce sens que je vous adresse ce jour ma candidature à la fonction d’expert pilote pour le lab internet & sociétés, même si je sais que cela risque, au mieux, de m’emporter dans des conversations interminables avec certains et, au pire, me fâcher copieusement avec.

Je pensais initialement postuler pour le lab réseaux & techniques mais, malgré le fait qu’il corresponde à mes occupations techniques actuelles, je préfère aujourd’hui rejoindre un cadre de réflexion plus large et à plus long terme que l’immédiateté des solutions de filtrage et d’analyse de flux qui, à mon sens, en plus d’être dangereuses, sont aussi contre-productives, que ce soit humainement ou financièrement.

Mon premier métier, c’est l’administration de réseaux. Je suis gérant d’une petite entreprise fondée au siècle dernier avec deux acolytes où j’exerce ce métier de telle façon qu’il reste avant tout un plaisir.

Je suis par ailleurs membre du bureau de l’association FDN, plus vieux fournisseur d’accès français encore en activité, où je m’occupe principalement de coordonner les développements techniques de la fédération d’associations que nous sommes en train de mettre en place.

Mon CV ne regorge pas d’une liste faramineuse de publications, je n’ai même jamais pris la parole dans un colloque ou une quelconque conférence, si on met de coté quelques lancements de projets en grande pompe et quelques démonstrations d’outils informatiques devant les forces de gendarmerie dans le cadre d’une association de lutte contre la pédophilie qui, faute de soutiens actifs, est malheureusement en sommeil au moment où j’écris ces lignes.

La totalité de mes travaux écrits sont publiés sur plusieurs blogs, signe que, comme la plupart de mes occupations, l’écriture et la réflexion que j’y mène sont avant tout des passions.

Ces publications traitent de technologie en général et plus particulièrement d’internet. Je publie également, de façon moins régulière, quelques documentations sur l’électronique et la domotique. La majeure partie du travail réalisé jusqu’ici consiste à rendre accessible aux non technophiles les principes qui sont la base d’internet aujourd’hui. Mes articles sont séparés en deux catégories, l’une suivant le fil rouge intitulé « comment devenir son propre fournisseur d’accès à Internet », l’autre étant constituée d’articles n’entrant dans aucune série et vulgarisant chacun un point technique bien précis.

Quelques-uns de ces écrits ont été repris et salués par la presse spécialisée, me laissant croire à une certaine crédibilité de mon discours.

Concernant la principale ligne directrice du lab internet & sociétés indiquée dans le dossier de presse, à savoir l’étude de fond des évolutions qu’internet est entrain de faire subir à nos sociétés (et inversement) et l’indispensable prospective qui va avec, elle me touche tout particulièrement, étant pour ainsi dire né avec les réseaux que nous connaissons aujourd’hui.

Une note de synthèse jointe récapitule mes projets concernant ce lab, dans l’éventualité où ma candidature serait retenue.

Concernant le temps à consacrer au lab, bien que les journées ne fassent toujours que 24 heures, l’estimation de temps indiquée dans le dossier de presse me semble bien basse étant donné la masse de travail prévisible. J’imaginais plutôt passer au moins une heure le matin et une autre le soir pour pouvoir ne serait-ce que suivre et aiguiller les débats qui auront lieu pendant la journée. Ceci représente un équivalent demi-journées mensuelles plus proche de 10 que de 4.

Etant libre de l’organisation de mon emploi du temps, et passant de longues heures quotidiennement dans les transports en commun, cette charge de travail est aujourd’hui compatible avec ce qui est déjà porté régulièrement sur mon agenda.

Vous trouverez ci-joint une note de synthèse sur le lab internet & societés et mon CV. Je vous laisse le soin d’apprécier le contenu de mes travaux sur mon blog http://blog.spyou.org/.


Recherches au sein du lab internet & sociétés.

J’ai toujours été un mauvais élève. Les hors sujets étaient mon loisir favori pendant le temps relativement court que j’ai passé sur les bancs de l’école. Le lab internet & sociétés est le seul me paraissant suffisamment large et souple dans sa définition pour accueillir convenablement les hors sujets pouvant, avec le temps, devenir pertinents.

Les labs ont été présentés comme cinq entités qui, à mon sens, ne pourront fonctionner qu’en collaboration sur de nombreux points, celui travaillant sur l’analyse des comportements sur internet et celui planchant sur les fondamentaux de la propriété et des libertés étant deux piliers qui alimenteront les trois autres respectivement en données factuelles et en pistes de travail à long terme.

Le long terme, c’est précisément le sujet qui m’intéresse. Comment s’est créé cet univers numérique ? Quels seront les mondes virtuels que je laisserai à mes enfants et comment nos décisions d’aujourd’hui influeront sur le numérique de demain ?

Le cyberespace existe depuis bien plus longtemps que l’avènement d’internet dans tous les foyers. Une vie s’y est développée, je suis de ceux qui habitent sur ces réseaux depuis plus de 20 ans et qui y ont commencé leur vie sociale.

Les industriels et les hommes politiques, et plus généralement ceux qu’on pourrrait appeller « les puissants » n’ont manifestement découvert notre existence que très tard et ne semblent pas encore vouloir comprendre avec précision les mécanismes complexes de nos univers virtuels.

Et pour cause, pour ceux qui y vivent depuis longtemps, ces mécanismes relèvent du comportement naturel mais vu de l’extérieur, ce monde et ses codes sont semble-t-il très obscurs.

Le lab internet & sociétés devrait donc avoir, à mon sens et dans l’immédiat, plusieurs missions :

  • Retracer l’histoire des comportements sociaux sur internet tel qu’ils existent aujourd’hui pour comprendre et documenter les fondements de cette nouvelle culture et la rendre compréhensible pour ceux qui s’y intéressent et qui n’en font pas partie.
  • Déterminer si l’appartenance à cette culture est générationnelle et/ou conjoncturelle et/ou socio-culturelle et dans quelles mesures.
  • Déterminer la proportion de population qui se réclame de cette nouvelle culture pour savoir si elle est une caractéristique principale des internautes ou ne concerne qu’une partie d’entre eux.
  • Déterminer à quel point les usages actuels d’internet sont primordiaux, du coté des particuliers et du coté des professionnels. Documenter les usages qui ont aujourd’hui évolué ou qui se sont créés et qui nécessitent impérativement internet.
  • Comprendre et expliquer précisément les enjeux du caractère mondial d’internet pour en déduire l’évolution sur le long terme.
  • Dresser une liste des lacunes les plus présentes dans les diverses tranches socio-culturelles de la population à propos d’internet, en mettant en avant celles devant faire l’objet d’actions de formation ou de sensibilisation afin que chacun appréhende correctement l’outil tel qu’il est, ses possibilités, ses limites, …

Cette liste non exhaustive devrait, dans un premier temps, permettre d’apprécier l’importance actuelle d’internet dans notre société et d’appréhender la façon dont le réseau s’est immiscé dans les usages avec le temps.

S’en suivront plusieurs réflexions correspondant plus aux missions de la haute autorité :

  • Etudier, en lien avec le lab économie numérique de la création, les fondements réels de la position de beaucoup de gens affirmant qu’aujourd’hui, le partage d’oeuvres protégées sur internet est une règle imposée par un comportement social généralisé et que c’est à la législation et à la notion de propriété intellectuelle de s’adapter.
  • Réfléchir, en lien avec les labs usages en ligne et économie numérique de la création, en fonction des résultats de l’étude ci dessus et les résultats chiffrés qu’ils auront obtenu concernant l’impact réel du partage sur le chiffre d’affaire des milieux de la création, aux actions à entreprendre pour améliorer la situation, si les chiffres venaient à prouver que le partage nuit effectivement à la création.
  • Dans le cas où les chiffres mettraient en évidence un danger effectif pour certaines catégories de métiers de la création, déterminer quels avenirs sont possibles pour ces métiers afin de conserver les emplois correspondant en proposant des adaptations.
  • Etudier et documenter la situation et l’histoire de la création non professionnelle dans l’univers de la création dans son ensemble pour déterminer son importance dans la société d’aujourd’hui.

Au delà de la mission fixée à la haute autorité par le législateur, ce lab me semble l’endroit idéal pour mener des réflexions poussées sur toutes les interactions entre le réseau et la société et tout ce qui en découle. Plusieurs sujets brûlants viennent immédiatement à l’esprit lorsqu’on évoque « internet & société ». Le respect de la vie privé, la convergence des médias, la dissémination des sources d’information, la démocratie directe, etc.

S’agissant de réflexions de fond, il me semble important que ces sujets et tous ceux qui viendront à l’esprit des gens puissent être abordés en marge de ceux concernant la création.

4 Comments »

  • Geo said:

    Je vote pour

  • Kevin Hinault said:

    C’est très courageux de ta part de « te sacrifier ». Dans d’autres cas, j’ai fait de même : mettre mes idéaux de côté pour changer les choses de l’intérieur tel un virus. Je sais a quel point c’est difficile à prendre comme décision. Tu fais preuve d’un civisme qui t’honore.

    C’est aussi, un peu, l’objectif de tout bidouillage de s’immiscer et transformer. Ce hack ne sera sûrement pas vu de cette manière par tout le monde mais je crois qu’un collège de personnes pouvant prendre des décisions pour tout un chacun mais sans aucun contre-pouvoir, sans débat d’opinion ne serait pas profitable à long terme. Tu jouerais ainsi un contre-pouvoir interne et d’autres personnes continueront un contre-pouvoir externe. L’important c’est de continuer à entretenir des liens avec le libre et expliquer à ceux qui ne comprendrait pas que le monde n’est pas binaire, 1 ou 0, mais bien analogique, que ton implication la dedans ne changeras en rien des opinions bien ancrées et qu’au contraire c’est une porte d’entrée pour eux.

    Prépares toi aussi à être minoritaire au sein de l’Hadopi et devoir « gueuler plus fort » que les autres pour te faire entendre. Prépares toi aussi à des déceptions de leur part. Rien ne dit que ce panier de crabe t’écouteras ou ne t’imposera pas des règles de confidentialité tordues.

  • Swâmi Petaramesh said:

    Où as-tu vu qu’un recruteur se tape la lecture d’une lettre de motivation d’une longueur telle, où la polémique pointe, et surtout pour un machin comme la Dopie ?

  • Bruno (author) said:

    Dans un pays ou l’homme use un peu de sa logique …

    Et encore, t’as pas vu mes 3 pages de CV :)

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